Ton dossard pour le 42,195 km du Marathon Pour Tous Paris 2024, le mail du vendredi qui fait plaisir après une semaine pourtant consacrée bizarrement à tout sauf à mon entrainement. J’ai donc fini par le décrocher, ce fichu dossard pour le marathon des Jeux Olympiques, préoccupée que je suis par l’atelier d’écriture jusqu’en juin et l’Ironman de Nice le même mois j’avais perdu de vue cette possibilité qui me réjouit puisque je serai à Paris le samedi 10 août. Plus que la distance, c’est le parcours même de l’épreuve qui me rend fière et heureuse de prendre le départ, en effet il emprunte la marche de Paris à Versailles qu’ont initié les femmes – who rules the world ? Girls – le 5 octobre 1789 pour réclamer à Louis XVI de quoi manger, ramener sa famille à Paris où il signera la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Pour la première fois de l’histoire olympique l’épreuve du marathon est ouverte aux amateurs, 20 024 coureurs et coureuses – je ne le répéterai jamais assez mais le premier marathon ouvert aux femmes a eu lieu à Los Angeles le 5 août 1984 seulement, vous ne trouvez pas ça dingue ?-sélectionnés sur la base de critères qui nous ont échappé à tous, tout autant que ceux qui ont permis d’être retenu en tant que bénévole sur les JO et sur les Para, tous n’ont pas eu la chance. C’est donc plutôt très détendue que je me rends le soir à la dernière rencontre de Chloé Delaume dans le cadre de son Maboulette Tour pour la sortie de son dernier roman, Pauvre Folle, que j’achète sur place à la libraire de la Petite Ourcq parce que oui je l’ai offert et non pas encore lu et je prends place dans l’hémicycle, ce soir je ne lis pas mon texte j’écoute la grande prêtresse. Je n’étais pas aussi détendue samedi dernier à son atelier d’écriture parce qu’elle m’avait prévenue que j’allais devoir sortir de ma zone de confort et ça n’a pas loupé, et d’une Cassandre est sa figure préférée et de deux elle n’a pas pu ou voulu déchiffrer le premier jet de mon texte, nous sommes sorties sur le trottoir elle cigarette et moi cahier, je lui ai lu la même version que j’avais fait pour toutes les précédentes, ça marchait bien au moment de la restitution mais plus cette fois, elle me dit que je pourrais lui sortir toutes les figures mythologiques sur des longueurs d’alexandrin, je les sors facilement. Elle veut lire autre chose et je l’écoute me suggérer son monologue la minute avant sa mort. J’écoute et je la laisse fumer sa clope, je me dis que je n’y arriverai jamais, elle continue à me parler de Cassandre et de tout ce qui peut se passer par la tête d’une condamnée à mort injustement, je l’écoute et je me dis que je vois bien mais que c’est au-dessus de mes moyens. Le reste de l’atelier je liste des mots, je regarde les autres participantes soumettre leur texte, plusieurs fois elle me sollicite mais je n’ai rien, je lui dis que je galère et elle répond C’est bien. Je n’ai pu me poser à nouveau face à ma page que le lendemain, presque vingt-quatre heures plus tard, vingt-quatre heures que j’ai passé avec une boule au ventre que je ne connaissais plus en repoussant à plus tard le face-à-face avec Cassandre et ce monologue de l’angoisse totale. Et j’écris. J’écris sur ma propre angoisse face à la page, peu importe puisque j’écris et j’y suis, Cassandre est face à la porte comme je suis face à ma page et elle se sait condamnée tout autant que je le serais si je ne sors rien parce que tout s’arrêterait pour moi ici, je finis et je lui envoie. Il est 19h05 quand je lui demande par mail si je pars pas trop mal, mal ou très mal, j’ai à peine le temps de publier sur le blog qu’elle répond Tu pars super bien, mais grave, t’as tout compris. La phrase d’après elle me demande si j’ai un projet de livre, recueil ou fiction, à lui présenter.

Photo : Marc Chagall, « Libération », 1952.

7 réflexions sur “Nice, France #4

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