Le cap des cent bornes en vélo, dire que je ne l’avais toujours pas franchi à ce stade, c’est pas comme si on avait été confinés à un kilomètre puis dix kilomètres de chez soi, sauf que j’ai utilisé tous ces prétextes pour ne pas rouler, tester l’endurance sur roues. Un mois avant mon premier triathlon longue distance je me décide enfin à accepter la proposition d’une cycliste, un groupe s’est formé de trois filles et trois gars, dont un triathlète inscrit l’année et cette année aux Sables d’Olonne, si ce n’est pas un signe ça. J’ai emmené mon vélo de course pour la première fois rouler sur Longchamp la veille, l’après-midi j’ai roulé avec l’autre vélo dans le bois de Vincennes avec un petit groupe de cyclistes motivées comme moi par le pique-nique prévu ensuite en plus grand comité. Le rendez-vous est donné place de la Nation le dimanche, il n’y a pas un chat et le soleil est déjà haut, je vais encore prendre des couleurs alors qu’on me croit revenue de congé, il faut d’abord sortir de Paris par les quais avant de profiter des premières accélérations. Je me souviens de ma sortie sur 80km qui avait emprunté les mêmes faux dénivelés sur lesquels j’avais pris du retard en vélo de route et laissé s’échapper le groupe devant moi, cette fois-ci je reste dans la roue du cycliste qui me précède, les sensations sont géniales. Le parcours qui nous mène de Paris à La ferté sous Jouarre fait partie des Classics Challenge, la trace est connue et indique quelques côtes, je ne m’en suis pas inquiétée, je n’arrive toujours pas à atteindre ces fichues vitesses tout au bout des prolongateurs. Je passe toutes les côtes en force, je pistonne à fond quitte à me mettre en position de danseuse et je double systématiquement trois cyclistes du groupe, je me sens en forme voire entraînée et surtout très à l’aise sur mon avion de chasse, je décolle et j’adore ça. Bien sûr, je ne me vois pas parcourir une longue distance en passant en force toutes les côtes ni sans boire une seule goutte d’eau, il n’empêche qu’au cinquantième kilomètre, mon excitation est à son comble et j’envoie un premier texto, je suis soutenue, c’est top. J’envoie un deuxième texto au moment de passer le sacro-saint cap des cent bornes, nous traversons Crouy-sur-Ourcq, ce canal que je connais si bien à Paris me semble ici beaucoup plus à sa place, entouré de verdure et d’oiseaux, de jolies berges sauvages. Sur le parcours, trois gares permettaient de s’arrêter à 80km, 110km ou 137km, la première étape n’est choisie par personne, deux personnes prennent le train à la deuxième et nous poursuivons vaillamment à quatre jusqu’à notre terminus à La Ferté. C’est là que les choses se compliquent, avec la chaleur et la fatigue la moindre côte devient un calvaire, je continue à les passer en force et je commence à crisper aussi dans les descentes, celle juste après Meaux nous trouve tous les quatre épuisés nerveusement. La dernière côte est celle de trop mais après six heures de route, l’objectif est atteint.