Achtung, le week-end part en chorale. Nous l’avons tant attendu, tellement espéré, nous y voilà. Vingt-quatre heures de déconnexion totale de tout écran, de détente par rapport aux objectifs, j’arrive à la Gare du Nord avec l’excitation d’un gosse qui partirait en colonie de vacances, toutes les choristes sont dans le même état, on se croirait parties pour traverser une frontière. C’est toujours le même train que nous prenons sur la même ligne H avec les mêmes stations qui défilent, dont nous commentons les noms tandis que le paysage gagne en charme bucolique. Presles, terminus. Le château n’a pas bougé et nous en prenons possession après une marche, que certaines ont qualifié de randonnée, à travers le petit village gagné par de récents chantiers, je fais aujourd’hui partie des anciennes et je renoue avec mes premières impressions lorsque je vois l’émerveillement dans les yeux des nouvelles choristes au moment de traverser le parc, puis les dortoirs jusqu’aux combles où je déniche une petite chambre que je n’avais jamais vue, en passant par les cuisines dignes d’un palace, enfin la salle de répétition où toutes s’installent. Premier week-end chorale avec notre nouvelle cheffe de chœur, elle a choisi de nous faire travailler les anciens chants, ceux d’il y si longtemps, l’émotion et les souvenirs font surface, Brassens se mêle à Fauré et au refrain de Over the Rainbow pendant l’après-midi tout entier, j’en oublie même de consulter mon téléphone oublié dans un coin alors qu’elle vient d’arriver. Dehors, il fait nuit noire, je tâtonne en direction du grillage pour aller à sa rencontre, j’ai hâte. J’en ai oublié ma sortie longue et les 45mn de vélo qu’il manquait à mon objectif de la semaine, mon corps est passé en mode hibernation depuis le trajet en train vers le fuseau harmonie vocale, rien d’autre ne compte plus que l’instant présent où je vais la chercher, des airs plein la tête. Une partie de tarot est engagée, le temps de lui servir un verre et elle file en cuisine aider celles qui préparent le dîner, ce château est magique au point que chacune s’y sente très vite chez elle. Le travail qu’effectue la cheffe avec nous est minutieux et détaillé, elle sait où elle veut nous amener, son idée de la chorale et de notre niveau semble précise et sa perspective déterminée, j’aimerais presque avoir le même positionnement par rapport à moi-même tant elle parvient à nous emporter exactement là où elle se projetait avec nous, à notre plus grande satisfaction. Nous parlons de souffle et de respiration, nous nous étirons et nous échauffons sérieusement, je ne peux pas ne pas espérer gagner encore un peu en capacité respiratoire lorsque je chante, sept heures de répétition au total pour sept heures d’entraînement cette semaine, quel bel écho. Le planning du week-end est en soi une partition dont je devrais m’inspirer pour mes séances. Depuis la salle à manger, elle nous entend chanter « La la la, je ne l’ose », un chant de la Renaissance extrêmement jouissif et gay, c’est pour chanter ce chant à trois voix que je suis entrée à la chorale dont il est emblématique, je me souviens de la fois où nous l’avons entonné dans le métro, c’était fou et je ne me doutais pas qu’il serait au programme ici… il fait son effet.