Cette fois j’ai pensé à amener ma serviette à la piscine, on n’a pas inventé mieux pour se sécher même si la technique de l’ébrouage canin appliquée à l’homme était presque convaincante, drôle en tout cas et le soleil a fini de me sécher sur le trajet retour en sortant de ma cabine 18, aujourd’hui j’entre résolument dans la cabine 13 après avoir pris tous les contre-sens à vélo hier soir pour rejoindre les jardins du Palais Royal, parfois cette furie furieuse d’être contre tout. Crier. Et tondre aussi, tondez-moi toute cette fausse candeur et ces boucles blondes d’une enfance qui ne veut pas passer quitte à foncer, tout défoncer, coupez tout que je puisse à nouveau rentrer dans un bonnet de bain convenablement, ah le voilà, convenir, dites-moi comment faire. Il ne m’arrive rien du tout dans cette cabine 13, je ne disparais même pas, non mais l’arnaque. Si seulement le soleil s’était montré vexé parce que je ne l’ai pas attendu pour me sécher avec une serviette moutarde, si seulement il avait plu à verse d’un seul coup, cela m’aurait réchauffé. La chorale fait donc sa rentrée en cherchant sa nouvelle cheffe de chœur et nos candidates se prêtent à l’exercice d’une répétition test en nous dirigeant sur un morceau de notre répertoire puis un morceau de leur choix, nous avons choisi Madame de Juliette que nous connaissons par cœur, je m’en donne justement à cœur joie de crier la colère de Juliette, je ne chante pas, je crie. C’est peut-être au fond ce qu’on attend du pupitre des altos, nous les Altesses, que nous crions. Vient le tour du morceau inconnu, Indochine. Bon, elle choisit la facilité, allons-y pour les paroles, Tallula. Ferme les yeux/Le temps s’en va/Et si tu veux/Rêve avec moi. Le coup fatal. Je suis vraiment obligée de chanter ça, ce n’est pas ma journée, le playback alto ça crie aussi.

Photo : Jean Dufy, « Paris, la Seine », 1937.

3 réflexions sur “Vichy #15

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