14 février, le marathon a lieu dans deux mois tout pile, je n’ai rien préparé encore. C’est indéniable, je n’en finis pas de reculer devant l’obstacle, pire je m’invente des prétextes pour mieux fuir l’échéance, que ce soit en imaginant que je peux atteindre les 43mn au 10km ou que je dois à tout prix m’initier à la natation et au vélo pour pratiquer un jour le triathlon. J’ai rendez-vous ce soir avec la piste de la porte de Charenton pour un retour au fractionné, il est grand temps pour moi de me recentrer sur la course à venir et pour laquelle je me suis inscrite dans un club, ne serait-ce que parce que j’ai réussi depuis à ne plus me blesser, profitons-en pour sortir de l’hiver au meilleur de la forme même si la fatigue est bien présente. Certes j’ai grappillé quelques secondes sur les courtes distances, mais je n’ai aucune sortie longue à mon actif depuis le trail des deux baies, et certes oui j’ai travaillé la vitesse mais j’en ai pâti dès que j’ai tenté d’aligner ne serait-ce que 15km parce que je partais trop vite, panique. Enfin, si je veux me faire plaisir à ce stage de triathlon, il va définitivement falloir travailler à nouveau et toujours davantage l’endurance, avant de sauter en selle ou à l’eau. Heureusement, la lumière des jours croît et avec elle la motivation pour filer à l’entraînement. Dans le métro, une jeune femme entre en tenue de course comme moi, elle me jette un regard puis vient s’installer en restant debout contre les sièges près de la porte de sortie, comme moi. Je l’observe des baskets à la casquette qu’elle tient entre ses dents pendant qu’elle s’attache les cheveux, elle lève à nouveau les yeux sur moi lorsque la tâche est accomplie, je sais où elle descend et je ne saurai dire à quel signe je le devine, je sais qu’elle sait que je le sais. Seulement, elle ne sait pas que je ne descendrai pas comme elle porte Dorée pour rejoindre ceux du club qui suivent l’entraînement habituel de fractionné, je descends une station après. Rien ne m’empêche de sécher la préparation marathon ce soir encore, c’est la Saint Valentin. Porte Dorée, elle descend, non sans m’avoir lancé un dernier regard appuyé, la rame repart. Pourquoi ne l’ai-je pas suivie directement, je ne le sais pas, je maudis la préparation, j’envoie un message à un autre coureur du club qui m’annonce au passage qu’il ne sera pas là ce soir. C’est la Saint Valentin, hauts les cœurs comme dirait Fauve, qu’avons-nous au programme, voyons 4x1500m et 10mn allure semi ou 10km, que les festivités commencent, des pompes… mais qu’est-ce que je fais ici, il fait froid et l’air est humide, je n’arrive pas à me réchauffer. Au bout de deux blocs, je me rends compte que ma vitesse est régulière, je cours seule, loin des autres coureurs rassemblés en groupes, le coach me reconnaît et m’encourage, je commence à prendre du plaisir au troisième bloc et je constate au bout des six kilomètres que je finis à la même allure, voire trois secondes de moins, qu’au début. Deviendrais-je constante. Enfin, je m’ouvre aux autres pendant les dix minutes de course qui suivent, on me félicite pour ma progression sur les dernières courses, j’ai envie d’embrasser le stade à tour de bras.