Naïvement, je me dis en sortant des douves du château de Chantilly et de la partie natation du triathlon que le plus dur est fait, maintenant que j’ai retrouvé terre ferme. C’était sans compter le scratch de ma combinaison qui a décidé de ne pas s’ouvrir, j’avais envisagé toutes les options pour me débarrasser au plus vite du néoprène, tout dérouler juqu’en bas, quitte à m’asseoir, et puis j’avais trouvé la bonne technique, mais jamais encore ce premier scratch en haut de la fermeture éclair ne m’avait résisté. Désespoir… Je remonte depuis le bassin vers le parc à vélo par les marches et je crie, le scratch reste fermé, quel que soit le bout par lequel je tente de l’arracher. Un dernier effort et il cède. Face à mon vélo, j’arrache le reste du machin en hurlant de colère, je jette le tout à terre. Aucun arbitre ne vient me pénaliser. Je souffle un bon coup et je récupère mon vélo pour partir en courant, plus légère et encore trempée de la baignade, il va faire très chaud.
Enfin seule. Et pour plus d’une heure. Le drafting est interdit mais je le verrai maintes fois pratiqué par des triathlètes d’un même club tout au long du magnifique parcours. Nous profitons de la fraîcheur de la forêt d’Ermenonville et du cadre pittoresque de villages très calmes, la circulation est quasi inexistante et les routes plutôt en parfait état. Sauf à détour d’un vilain virage où les pavés ma agencés ont déjà fait une victime, le samu est en train d’évacuer un blessé, je passe à mon tour de manière très chaotique et en retenant mon souffle. Je crois en avoir fini avec les pavés lorsqu’un nouveau panneau m’incite à ralentir alors que j’ai accéléré à nouveau, je suis secouée et mon vélo déraille. Tout se passait tellement bien jusqu’ici, c’est pas comme si j’avais paniqué en nageant. Forcée de mettre pied à terre, j’entends les autres cyclistes s’en prendre violemment aux pavés, j’ai de la chance de n’être pas tombée, je remets la chaîne et je repars vite à vélo.
Des bolides incroyables me dépassent à vive allure, des vélos complètement fous furieux, qui font un bruit pour moi inouï, l’air siffle à travers comme s’il produisait de l’énergie. Quelques cyclistes m’encouragent en me doublant, à côté d’eux je me fais l’effet d’une néophyte perdue sur un circuit de professionnels, et de fait je suis débutante puisque je n’ai pas encore une sortie de 100km à mon actif, je réalise mon manque d’expérience. Mais par-dessus tout, je ne bois pas une goutte d’eau sur les 45km que compte le tracé. Une erreur que même le débutant ne commet pas. J’accuse le coup, je suis déshydratée. En même temps, loin d’avoir atteint les 30km/h, je me dis qu’il me reste encore de l’énergie pour courir. Je vide le gobelet qu’on me tend, ma vue se trouble, mais je cours. Encore 10km et je serai triathlète, je suis une coureuse, je n’ai pas le droit de flancher.