Un pincement au cœur oui, bien sûr que j’ai ressenti un pincement au cœur en quittant mon île, j’y ai laissé tellement de moi cette année, un peu plus de sel que d’ordinaire, c’était marquant. J’arrive à l’aéroport de Mykonos après plus d’heure de marche depuis le nouveau port sous le cagnard et dans la nervosité d’une circulation chaotique, je suis en sueurs et je m’effondre à ma place, du côté du hublot d’où je ne pourrai pas voir Tinos et son port et sa baie et mes sentiers. Alors je décide de dormir mais je ne peux pas, je rumine et je lis pour disparaître un peu dedans, je somnole et par intermittence je vois apparaître par le hublot une île, c’est encore la Grèce et les ferrys laissent une trace qu’il est encore possible de distinguer depuis notre hauteur, je lis et je sombre à nouveau puis j’ouvre les yeux sur une côte immense, c’est encore la Méditerranée. Puis les Alpes me tirent de drôles de rêves totalement absurdes, il n’y a pas beaucoup de neige… J’ai un drôle de vague à l’âme, comme un sentiment d’étrangeté à ce que je vis, ce que je vois, oui les sommets me semblent moins enneigés qu’avant et après, oui le bal des ferrys continue, je ne sais pas trop si je dois me sentir concernée, faire semblant de lire alors que je lis de travers ou plonger dans un sommeil qui ne veut pas de moi pour me jeter dans des rêves aussi idiots, d’un coup, ou plutôt après une éternité interminable mon regard est happé par quelque chose. Cette fois-ci, cela m’est familier, un lac avec deux îles dont je connais les contours par cœur, tiens mon cœur se met à battre à nouveau, c’est la base de loisir de Torcy que je reconnais très distinctement et juste en face, le lac de Vaires-sur-Marne avec la longue piste vers la Marne. De mon index, comme certains faisaient au primaire pour lire et je me demandais pourquoi, je suis la Marne en passant par Bry-sur-Marne et son pont, la boucle de Saint-Maur et mon lycée d’hypokhâgne - avant (enfin !) d’atterrir en classes prépa à Paris (Paris !), le Bois de Vincennes apparaît à son tour, bien plus touffu depuis les airs que depuis le plancher des coureurs de fond. Puis la Seine dessine son joli visage et je lui souris, mon jardin extraordinaire sous mes pieds ! L’Arc-de-Triomphe est visible comme jamais, je distingue mon tracé entre l’avenue Wagram et l’avenue Foch et un peu plus loin, mais oui c’est bien le bassin extérieur de Molitor, je jubile. Bien sûr l’hippodrome de Longchamp ne tarde pas à se découper en plein cœur du bois de Boulogne et l’avion rebique sur la droite en direction toute de l’aéroport de Charles-de-Gaulle, d’un coup toute trace de fatigue s’est dissipée pour laisser place à l’excitation d’être chez moi. Les magnifiques balises blanches et rouges des sentiers escarpés sur l’île me ramènent aux couleurs de mon vélo qui n’attend qu’une chose, que je le gonfle pour repartir sur les routes.
Photo : Joan Miro, "On ne se voit pas dans la mer".
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Tu écris bien, Isabelle. Et ce souffle.
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Merci Caroline, ça me touche.
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Très beau texte
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Merci beaucoup !
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Non merci à toi Isabelle
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