Il me restait cinq tickets d’entrée pour la piscine, que je voulais utiliser avant la fin de l’année pour me décider ensuite à retourner aux entraînements et aux entraînements seulement. Même chose pour la course à pied, les bonnes résolutions avant le Réveillon. Déterminée par cet objectif, je suis arrivée pleine d’entrain devant une piscine portes closes le 24 décembre parce que le responsable du guichet ne donnait plus de nouvelles. Pas moyen de me détendre donc le jour de Noël, passons. Mon objectif tombe à l’eau. Admettons que je visais la fin des vacances scolaires pour épuiser ces fameux tickets. Plus de cinq jours ont passé lorsque je retourne à la piscine, toujours à la pause de midi. Je ne suis pas la seule à avoir choisi ce créneau d’ordinaire plutôt calme, lundi y compris. Comme d’habitude, je m’insère dans la ligne réservée à la nage en crawl et je suis bientôt rattrapée par un premier athlète, palmes aux pieds, puis un autre, les rangs se serrent autour des remous et nager m’apparaît alors plus inconfortable que jamais dans ma ligne. Je change pour la ligne réservée aux nageurs dotés de matériel, puisque ceux avec palmes se sont permis de s’immiscer dans ma ligne, oui la mienne. Et tant que j’y suis, j’en profite pour m’exercer à la brasse coulée que je n’ai plus pratiquée depuis un bail. Au moment où je commence à me détendre, une nageuse d’un âge certain, que j’ai doublée plusieurs fois, accrochée à sa planche, me signifie qu’il s’agit de sa ligne et non de la mienne, puisque je n’ai ni palme ou planche, pas plus que de plaquette, pull boy. Résignée, je change de ligne une dernière fois. C’est bien la première fois de l’année que je me décidais à quitter la ligne réservée au crawl, ma première année de natation… je m’en éloigne définitivement. Me voici dans une ligne sans identité ni privilège, et je me retrouve coup sur coup à devoir doubler en crawl des nageurs dotés d’une planche dont ils ne semblent pas vouloir se servir correctement pour prétendre à la ligne du matériel. C’est alors seulement que je me revois il y a tout juste neuf mois, dans le bassin de 50m de la piscine Georges Hermant, en train de me débattre avec une planche qui m’échappe, tout comme ma respiration, à boire la tasse en agitant mes jambes qui ne brassent rien qu’un tourbillon dans lequel je me noie, sans qu’aucune propulsion ne me permette d’avancer, d’espérer et de progresser mouvement après mouvement. La case départ. Pourtant je vais y croire, séance après séance, sur 50 puis 400m et enfin un kilomètre… découvrir petit à petit, pas complètement encore, le plaisir simple de la glisse dans l’eau. Un peu comme une relation qui aurait démarré dans la confusion d’un tourbillon sans direction, et qui découvrirait la force de son évidence à la faveur d’un vent nouveau, aussi puissant qu’inattendu, poussé par les ailes d’un furieux désir de se surprendre. Enfin.

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