J’ai à peine le temps de rentrer me doucher en ce dimanche sportif et festif, qu’il me faut partir à nouveau en direction du canal pour le concert que la chorale donne à 14h dans le cadre du festival Voix sur Berges, pour l’anecdote le parcours vélo du triathlon passait par là. Le parcours vélo passait également par la piscine Molitor dont j’ai vu apparaître d’un coup le bâtiment et sa couleur jaune soleil si unique, si atypique Porte d’Auteuil, un superbe clin d’œil. Lorsque je marche le long du canal, je m’aperçois que toutes les algues brassées le matin même par les deux-mille nageurs furieux du triathlon, sont remontées à la surface sous la forme de vieilles peaux de serpents morts, j’en ai même trouvé les noms, il en existerait au nombre de trois, Myriophylle, Cératophylle et Elodée du Canada, ça ne me les rend pas plus sympathiques. Mes jambes ont un peu de mal à avancer, je me rends compte que je n’arriverai pas à temps pour l’échauffement vocal, c’est pire que ça, il est l’heure, la chorale est déjà prête à chanter. Discrètement, je rejoins mon pupitre et nous déclinons le répertoire sur 40mn, tambour battant. Arrive le dernier chant, Youkali de Kurt Weill, que je chante avec un bonheur fou, mieux plus je le chante, et il est au répertoire depuis plus longtemps que les autres parce que nous l’adulons, plus l’émotion avec laquelle je le chante est forte, comme si je projetais quelque chose de moi, par exemple cet instant où je vois les contours de mon île se dessiner lorsque le ferry s’approche, et je sens que je ne suis pas la seule dans ce cas, nos regards humides se croisent dans le pupitre. C’était notre dernier concert avec Albane, qui reprend ses études de direction d’orchestre l’année prochaine, la chorale se retrouve à nouveau dans la même situation que l’année précédente, à devoir retrouver une cheffe de chœur pour la rentrée, mais ce ne sera pas Albane. Nous lui offrons des fleurs, un micro karaoké, et nous l’invitons à boire un verre sur les berges, avant qu’elle ne rejoigne la chorale dans laquelle elle-même chante, le concert est prévu à 16h. J’ai rencontré ma chorale sur ces berges, lors de ce même festival il y a près de dix ans et j’en suis tombée littéralement amoureuse, les arrangements, l’ambiance, le répertoire, l’enthousiasme général si communicatif de ces femmes et leur engagement humaniste surtout, c’est devenu ma nouvelle Le chiffre cinq, et on ne va parler que du masque lors de l’AG, misère. Il nous est tellement impossible de quitter Albane que nous la suivons toutes pour le concert de sa chorale, un chœur mixte dont le répertoire est essentiellement anglais, je ne tiens plus debout et je m’assois avec d’autres à même le sol pour me laisser bercer par les mélodies de Purcell. On applaudit autour de moi. Je venais de m’assoupir sur l’épaule de ma cheffe de pupitre alto.

Photo : Joan Miro, « Femme assise », 1931.

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