Le boulevard Ney, du nom de l’un de ces innombrables maréchaux qui ont donné leur nom à la petite ceinture reliant chacune des portes de Paris, s’étend sur 3000m, c’est- à dire la distance d’un échauffement qui vous mène d’Aubervilliers à Villiers, un peu comme on parle du haut et du bas du village, du vieux et de la périphérie de la ville. D’Aubervilliers à Villiers au passant par Auber, voici les délimitations de mon quartier. Aucun touriste ne prendra jamais ce boulevard, pourtant le dépaysement est flagrant depuis la rue d’Aubervilliers qui jouxte Stalingrad et ses quartiers désaffectés, les bouis-bouis où l’on ne rentre pas si l’on ne connaît pas le patron, jusqu’à l’avenue de Villiers. Le 18e arrondissement trouve son identité entre le 19e et le 17e arrondissement, en prenant la popularité familière de l’un et les avenues bordées de terrasses de l’autre. Entre les deux, l’hôpital Bichat fait figure d’un bâtiment sorti d’un siècle arriéré, c’est presque l’asile psychiatrique de Maison Blanche sauf qu’on est en plein Paris ou quasi. En poursuivant vers Villiers on arrivera à la place de l’Etoile, tandis qu’en retournant vers Aubervilliers, on se trouve dans une ville de proximité en pleine reconstruction, même la porte de la Chapelle nous parle d’une place prochainement explosive de vie. En attendant, le quartier du marché de l’Olive derrière le métro Max Dormoy, frontière vers le 19e, est plus animé et avenant que le marché ouvert sur les trottoirs étriqués de l’avenue de Saint-Ouen, j’y trouve si peu de place pour courir que j’opte parfois pour la piste cyclable une fois arrivée au métro Guy Môquet, à la frontière ici avec le 17e. Evidemment, au sens large, le village de Clignancourt pourrait ressembler à cette presqu’île retenue de part et d’autre de la puissante stratosphère parisienne et du romantisme de la butte Montmartre par deux ponts séparés l’un de l’autre de 2000m. D’un côté, les graffitis fleurissent chaque jour près du pont Marcadet qui reliait l’ancienne gare de la petite ceinture à la gare du Nord, de l’autre on vient déposer des fleurs sur les tombes qu’enjambe le pont Caulaincourt, juste au-dessus du cimetière, et dont la première pierre du pont a été posée le même jour que celle de la mairie du 18e. Bien sûr lorsque je grimpe les marches jusqu’en haut de la rue du Mont-Cenis et que je me retourne pour voir aussi loin que les jolis dénivelés du Val d’Oise, ma vue ne porte pas jusqu’au Danemark mais le cœur et l’inspiration me portent vers un mystère à creuser comme dans les forêts aux noms enchanteurs et croisées dans les contes du Nord. Et au Sud se trouve certainement une île pour délimiter mon quartier comme il se doit, cette île vers laquelle s’envolent mes pensées lorsqu’ici malgré mes repères, l’animation des rues et le bonheur de m’élancer vers mes frontières imaginaires cela va moins bien.

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2 réflexions sur “Clignancourt #3

  1. Belle description de ce coin de Paris, très vivante.
    Rare sont ceux et surtout celles, qui prennent le temps d’écrire dessus.
    À la fois témoignage et tranche de vie…
    J’aimais assez fureter dans les boutiques juste après le périphérique,
    Surtout ceux de vêtements.
    Dépaysement garanti !!!
    Bravo et merci pour un petit voyage dans mes souvenirs…
    Miss G 😊

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